Négocier son salaire : quelles bonnes pratiques à adopter ?

NÉGOCIER SON SALAIRE – PARTIE 1

Vous êtes en plein processus de recrutement et tout se déroule plutôt bien pour vous ! Seule ombre au tableau : la question de la rémunération, qui vous préoccupe beaucoup. Quand et comment aborder le sujet ? Quelle attitude privilégier pour faire entendre vos prétentions salariales ? Comment asseoir votre posture et appréhender la négociation ? Rassurez-vous, vous êtes loin d’être le (la) seul(e) à vous poser toutes ces questions !

 

Selon vous, quel est le meilleur moment pour aborder la question de la rémunération pour la première fois ?

 

Cette question intervient à différentes étapes du processus de recrutement. Les premiers éléments de rémunération sont a priori fournis dès la publication de la fiche de poste, qui est censée comporter une fourchette de salaire, quand cela est possible. Il s’agit d’une première indication sur laquelle il faut d’emblée s’accorder puisqu’elle servira de base de discussion lors de la négociation. Chez Les Nouveaux Héritiers, nos consultants en recrutement vérifient avec les Talents que ceux-ci ont bien pris connaissance de cette fourchette et qu’elle leur convient dès l’étape de préqualification. Initier un processus de recrutement sans s’accorder sur cette première base, c’est prendre le risque de perdre son temps, côté Talent comme côté recruteur !

Si cette fourchette de rémunération n’est pas communiquée, il est donc important de faire rapidement le point avec votre premier interlocuteur pour éviter les surprises, ainsi que tout déplacement inutile.

 

Une fois la fourchette de rémunération fixée, quel est le moment opportun pour revenir sur le montant précis du salaire et la négociation d’éventuels avantages complémentaires ?

 

Je pense qu’il ne faut pas précipiter les choses. Dans un premier temps, il est primordial de s’intéresser au poste proposé par l’entreprise et à l’entreprise elle-même tout en démontrant ce que l’on peut apporter soi, dans le cadre des missions proposées, et même au-delà du périmètre défini dans la fiche de poste.

Faire ce travail, c’est gagner du temps sur la suite : cela permet de mettre en avant son intérêt pour le poste et l’environnement de travail. C’est aussi un excellent de moyen d’exprimer concrètement ce que l’on peut apporter à l’entreprise, ce qui permettra de susciter encore davantage l’intérêt du recruteur. La négociation n’en sera que facilitée : vous n’aurez plus à prouver ce que vous valez ! Aussi, j’aurais tendance à conseiller d’attendre le second entretien pour entrer dans le vif du sujet et évoquer la question de la rémunération dans le détail.

 

Si le recruteur me questionne sur mes prétentions salariales dès le premier entretien, comment répondre ?

 

Cela peut arriver, effectivement. C’est notamment souvent le cas lorsque le premier entretien est mené par une personne de l’équipe des ressources humaines, puisque son rôle consiste à s’assurer que vos prétentions salariales correspondent à ce qui avait été imaginé en interne. Si les montants ne concordent pas, il évite ainsi de solliciter inutilement les équipes métiers en vue des prochains entretiens.

Si la question vous est posée d’emblée, vous ne pouvez bien évidemment pas l’éluder. Il faut dans ce cas faire preuve d’un peu d’habileté en répondant à la question… En vous laissant une certaine marge de manœuvre pour y revenir plus tard. L’essentiel étant de montrer à votre interlocuteur que vous êtes ouverte à la discussion afin de ne pas restreindre le champ de négociation possible.

 

A l’inverse, si le recruteur ne semble pas vouloir aborder le sujet, est-ce mauvais signe ?

 

Il n’existe pas de bon ou mauvais signe envoyé par le recruteur, chacun détient sa propre stratégie. Je pense que dans la majorité des cas, le recruteur se laisse du temps avant de creuser la question de la rémunération. Si l’on part du principe qu’une fourchette de salaire a été validée en amont, il va considérer que le Talent dispose de suffisamment d’éléments à ce stade du process. Il est donc probable qu’il n’aille pas plus loin au cours du premier entretien. Il se concentrera davantage sur l’échange pur, car cela lui permet deux choses : tout d’abord, il pourra observer la façon dont vous vous présentez à lui et dont vous valorisez vos compétences, vos expériences au regard du poste. Cela lui fournit un grand nombre d’informations qui lui permettent de mieux vous connaître et de voir si votre profil correspond à celui recherché. D’autre part, le fait de conserver une marge de manœuvre est un moyen de pouvoir ajuster ensuite le niveau de rémunération au vu de ce que vous pouvez apporter à l’entreprise.

Cette recherche du juste équilibre se pratique dans les deux sens. Il arrive ainsi que le recruteur vise de prime abord le bas de la fourchette indiquée dans la fiche de poste et qu’il change d’avis compte tenu de l’étendue de votre potentiel. S’il n’est pas pressé d’aborder le sujet, j’aurais donc tendance à penser qu’il laisse tout simplement la primeur à l’échange de façon à mieux vous connaître et à estimer votre potentiel à sa juste valeur.

 

Est-il pertinent de proposer une rémunération inférieure à celle du marché pour mettre toutes les chances de mon côté ?

 

Faire une première proposition d’emblée inférieure n’est pas nécessairement la meilleure initiative à avoir. Si vous avez le sentiment que cela peut vous permettre d’être concurrentiel, il est possible que cela produise l’effet inverse. Le recruteur risque plutôt s’inquiéter de votre proposition, car vous envoyez ainsi de mauvais signaux : il peut supposer que vous manquez d’expérience, que vous ne maîtrisez pas complètement les missions proposées, que vous n’êtes pas sûre de vous et de vos compétences, ou que vous avez une connaissance restreinte du marché. L’absence d’exigence sur la question du salaire peut créer un climat d’insécurité et laisser craindre le pire !
Savoir s’évaluer et jauger ce que l’on vaut est souvent déterminant au cours d’un processus de recrutement. Le meilleur moyen d’augmenter sa compétitivité reste encore d’étudier les prix de marché et de se positionner au regard de ses compétences, de son expérience pour évaluer le montant du salaire que l’on peut envisager de demander. C’est la finesse de cet ajustement, cette connaissance que vous avez de vous-même, de votre valeur, qui fera mouche avant tout, quel que soit le salaire auquel vous prétendez.

 

Demander plus ou bluffer sur son précédent salaire sont des pratiques plutôt répandues. Ont-elles vraiment fait leurs preuves ?

 

Faire reposer sa négociation là-dessus me paraît plutôt inadapté. Même si elles ne vous nuiront pas forcément, ces pratiques sont anecdotiques et ne vous permettront pas, à elles seules, d’obtenir ce que vous souhaitez. À vrai dire, le montant de votre précédent salaire importe peu le recruteur, d’autant plus que vous n’occupiez pas nécessairement le même poste. Ce sont vos prétentions salariales à l’instant T additionnées à vos compétences et votre expertise face au poste qu’il vous propose qui vont l’intéresser. Comme évoqué précédemment, c’est avant tout votre capacité à estimer votre valeur qui fait la différence. Celle-ci se détermine en croisant une multitude d’éléments : vos compétences, votre expérience, les éventuelles recommandations de vos anciens employeurs, votre approche du métier, votre état d’esprit… Le tout, encore une fois, en s’appuyant sur les prix du marché, mais aussi sur la loi de l’offre et de la demande. Plus votre profil est rare est recherché, plus vous avez de chances de pouvoir tirer votre épingle du jeu. Apprendre à bien vous connaître pour jauger votre valeur reste votre meilleur atout.

 

Le fait de faire patienter un recruteur ou de refuser une offre peut-il s’avérer pertinent ? 

 

Cela a un impact effectivement, mais encore une fois, je ne suis pas certaine que cela vous soit bénéfique. Dans un sens comme dans l’autre, le fait de faire attendre, d’avoir à patienter ne présume rien de bon. Cela n’engage que moi, mais je reste persuadée qu’il faut partir du principe que vous avez en face de vous quelqu’un qui a besoin d’un minimum de transparence, qui a besoin d’être convaincu de votre motivation à occuper le poste proposé… De la même manière que vous ayez besoin de sentir que l’entreprise est enthousiaste à l’idée de vous compter dans son équipe. Je crois que simplifier l’échange sans forcément avoir recours à des pratiques de ce genre, c’est aussi se donner la possibilité de revenir à l’essentiel : au-delà des stratégies de négociation, du montant de votre rémunération, la question de l’épanouissement au travail est fondamentale.

 

En tant que Directrice Générale et Fondatrice de l’agence Les Nouveaux Héritiers, vous détenez une solide expérience en matière de recrutement. 

Au vu de tous les questionnements que nous avons pu aborder ici, quelle approche est à privilégier selon vous pour mettre toutes les chances de son côté et négocier son salaire de façon pertinente ?

 

D’expérience, je peux l’affirmer : il n’existe pas de conduite idéale, de formule miracle pour parvenir à ses fins. Selon moi, l’essentiel est de toujours garder en tête que la question de la rémunération ne peut être décorrélée de son contexte et qu’il est indispensable de savoir évaluer ce que l’on peut apporter à l’entreprise pour être en mesure de négocier. Par ailleurs, je crois que le montant de la rémunération ne doit pas être considéré comme une fin en soi. Certes, être satisfait de la rémunération qui vous est proposée est un prérequis important. Mais viser l’épanouissement professionnel global doit rester une priorité, et celui-ci ne peut être atteint au travers du prisme unique de la rémunération.

Maîtriser l’art de la négociation est un atout clé pour obtenir le salaire souhaité, il s’agit également d’un formidable outil pour viser l’épanouissement au travail. Négocier de façon pertinente nécessite de faire le point sur ce que l’on gagne en intégrant l’entreprise comme sur ce que l’on lui apporte soi. Cela implique donc de questionner sa propre valeur, ses attentes, ses motivations, et de faire la balance avec ce que l’entreprise, le poste proposé, peuvent nous apporter au regard de tout cela, au-delà du salaire. Intégrer une entreprise, occuper un nouveau poste relève d’un engagement fort, d’une véritable implication : vous intégrez une équipe, adhérez à un projet, un environnement de travail, une vision. J’en suis persuadée : l’épanouissement réside dans notre capacité à trouver comment combiner toutes ces notions. Questionner son degré d’adhésion à l’entreprise à laquelle on postule, écouter son cœur reste, quoi qu’il arrive, fondamental.

 

Apprendre à bien vous connaître pour jauger votre valeur reste votre meilleur atout.

partager l'article